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Les conséquences d’une offre au prix et aux conditions du mandat : saint mandat, protégez-nous !

Alain COHEN-BOULAKIA, SVA Avocats, 

L’agent immobilier a trouvé un acquéreur au prix et aux conditions de mandat…

Quelles sont les obligations du vendeur ?

On va se placer dans l’hypothèse où l’offre n’a pas été acceptée formellement par le vendeur. 

Rappelons une règle importante qui produit un effet dévastateur et inattendu… une offre d’achat au prix et conditions du mandat de l’agent immobilier n’engage pas le vendeur (Cass. Civ.1 – 14.121.2004, n°03-10528), et ce dans la mesure où le mandat que détient l’agent immobilier n’est pas un mandat de vente mais un mandat d’entremise.

Hélas la clause par laquelle il est convenu que le vendeur s’engage à ratifier la vente à tout preneur présenté par l’agence en acceptant le prix et les conditions du mandat n’a pas, à ce niveau, d’efficacité (Cass. Civ.1, 10 mai 1995, n°95-16114).

L’agent immobilier peut être tenté d’insérer, au visa de l’alinéa 3 de l’article 72 du décret n°72-678 du 20 juillet 1972, une clause donnant mandat à l’agent immobilier d’aliéner le bien en lieu et place du mandant. Cette clause n’est pas conseillée. Elle est source de contentieux. On est en ce cas dans le cas d’un mandat de vente.

De surcroît une telle clause pourrait étalement ne pas s’avérer efficace sauf dans certains cas très précis, à titre marginal.

En effet lorsqu’un bien est « commercialisé » par l’agent immobilier on est tenté de brandir les dispositions de l’article 1114 du Code Civil selon lesquelles :

« L’offre, faite à personne déterminée ou indéterminée, comprend les éléments essentiels du contrat envisagé et exprime la volonté de son auteur d’être lié en cas d’acceptation. A défaut il y a seulement invitation à entrer en négociation ».

Ce point est mis en exergue en ce qui concerne la vente d’un bien immobilier, la jurisprudence ayant retenu qu’il s’agissait une opération complexe (Cour Appel de PARIS, 3 juillet 2014 ; n°13/08543). Aussi, même dans l’hypothèse où le mandat contiendrait une clause autorisant l’agent immobilier à s’engager pour le compte du client, il n’est pas certain qu’elle permettrait que soit sanctifié une vente, par suite d’une offre d’un acquéreur au prix et aux conditions du mandat.

Aussi, non seulement la règle du « premier arrivé, premier servi » ne s’applique pas, mais encore le mandant peut-il, face à plusieurs offres, choisir celle qui lui convient le mieux (par exemple à un prix inférieur au prix du mandat mais avec un prix payable au comptant, plutôt qu’au prix du mandat assorti d’un financement) … ou choisir de ne pas contracter.

Mais au-delà de l’absence d’obligation pour le mandat de vendre son bien immobilier à un acquéreur qui a formalisé une offre au prix et aux conditions du mandat, l’agent immobilier peut-il avoir droit à ses honoraires ?

En vertu de l’article 6, I, alinéa 3, de la loi du 2 janvier 1970, aucune somme d’argent ne peut être perçue par l’agent immobilier avant qu’une opération ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l’engagement des parties.

Dès lors, comme l’a martelé la Cour de Cassation (cf pour un exemple Cass Civ 16 /11 /2016, N°15.22010), il ne peut y avoir condamnation au paiement des honoraires…

Citons notamment une décision récente de la Cour d’Appel de NÎMES dans un arrêt récent du 21 février 2021 (CA NÎMES 21 février 2021, n°19/01228) : 

« Il ressort de ces dispositions que la rémunération de l’agent immobilier n’est due que s’il a accompli sa mission et à partir du moment où la vente est parfaite. Le refus du mandant de réaliser la vente avec une personne qui lui est présentée par son mandataire ne peut être assimilée à l’acte écrit contenant l’engagement des parties. Ainsi, il est constant que l’absence de réalisation de la transaction prive l’agent immobilier du droit à rémunération. »

Mais peut-il y avoir droit à dommages et intérêts ? La Cour d’Appel de NÎMES poursuit : 

« L’agent immobilier peut prétendre à l’attribution de dommages et intérêts lorsque la transaction ne s’est pas réalisée du fait du comportement fautif de l’une des parties à l’opération.

Néanmoins, le mandant reste libre de rompre les pourparlers et il incombe à l’agent immobilier de démontrer de sa part une faute et cette faute ne peut être constituée par le simple refus du mandant de signer la promesse de vente. »

Autrement dit, le simple fait de refuser de signer la vente n’est pas une faute et il faut aller rechercher d’autres éléments pour caractériser l’existence d’une faute pouvant emporter droit à dommages et intérêts… On ne peut hélas être plus clair…

Bien sûr, si en définitive la vente intervient au profit du tiers acquéreur, l’agent immobilier évincé peut légitimement avoir droit à des dommages et intérêts.

Il arrive cependant que certains tribunaux fassent davantage preuve de pragmatisme pour considérer que le mandat doit « sécuriser » l’agent immobilier. C’est ainsi que la Cour d’Appel de LYON, dans une décision remarquée du 31 janvier 2020 (Cour Appel de LYON, 6ème chambre, 31 janvier 2020 ; n°17/08844) a adopté un raisonnement totalement à l’opposé de celui de la Cour de Cassation évoqué ci-dessus, repris notamment par la Cour d’Appel de Nîmes, en ces termes : 

« Le refus de signer un compromis avec un acquéreur, offrant le prix demandé sans réserve ni condition suspensive, procède d’une légèreté fautive et constitue un manquement à son engagement contractuel (du vendeur) de « signer toute promesse de vente ou tout compromis avec tout acquéreur que le mandataire lui aurait présenté au prix charges et conditions des présentes » … »

Et la Cour d’Appel de LYON d’entrer en voie de condamnation, à hauteur d’une indemnité compensatrice forfaitaire égale à la rémunération prévue au mandat…

Le droit n’est pas tout à fait une science exacte !

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