La présence de fissures sur une maison peut entraîner bien des tracas pour l’acquéreur. En effet, cette problématique soulève souvent des questions quant à la garantie des vices cachés lors de ventes de biens anciens entre particuliers. La Cour de cassation a récemment rendu plusieurs décisions très instructives concernant la mise en œuvre de cette garantie, et notamment pour les cas où l’acquéreur se plaint de graves fissures. Quels sont les enseignements à tirer de ces arrêts ? Comment établir qu’un vice soit «apparent» pour éviter d’être couvert par la garantie des vices cachés ?
Les principes fondamentaux de la garantie des vices cachés
Selon les articles 1641 et suivants du Code civil (C. civ. art. 1641 et s.), l’acquéreur d’un bien immobilier dispose d’un recours à l’égard du vendeur en cas de vices cachés. En pratique, après expertise judiciaire, ce recours permet à l’acheteur de demander la résolution de la vente ou une diminution du prix proportionnelle au préjudice subi.
L’article 1642 du Code civil précise toutefois que le vendeur n’est pas tenu de garantir les vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même avant la vente.
Le contrôle strict de la Cour de cassation
Dans le cadre de ses arrêts, la Cour de cassation exerce un contrôle strict sur l’application des articles 1641 et suivants du Code civil (C. civ. art. 1641 et s.). Ainsi, elle veille à ce que les vendeurs ne soient pas tenus pour garants des vices apparents dont l’acquéreur aurait pu avoir connaissance lors de la vente (C. civ. 1642).
Cass. 3e civ. 22 6 2023 n° 22-17832 : deux arrêts remarquables
- Affaire 1 : Les acquéreurs d’une maison avec piscine sont confrontés à l’apparition de graves fissures affectant la solidité du bien immobilier. Ils engagent alors une action en garantie des vices cachés à l’encontre des vendeurs.
- Affaire 2 : Dans un autre cas, les acheteurs se plaignent également de graves fissures sur leur maison nouvellement acquise, affectant là aussi la solidité de la construction.
La prise en compte des circonstances de chaque affaire
Dans ces deux affaires, pour déterminer si les vices étaient apparents ou non, la Cour de cassation a pris en compte les éléments et circonstances propres à chacune des situations (consistance des fissures, visite du bien par l’acheteur…). Cela montre ainsi son attachement à examiner scrupuleusement chaque cas d’espèce pour trancher entre la garantie des vices cachés et le caractère apparent du vice.
La notion de vice «apparent» liée aux fissures
Pour qu’un vice soit considéré comme «apparent», il faut que l’acheteur puisse en avoir connaissance lors de la vente en exerçant un examen attentif du bien. Ainsi, si des fissures sont visibles au moment de la visite, elles pourront être considérées comme des vices apparents dont l’acquéreur avait conscience (C. civ. 1642).
L’exigence d’une expertise judiciaire
Dans tous les cas, une expertise judiciaire sera nécessaire pour déterminer précisément la nature et l’étendue des désordres affectant le bien immobilier. Cette expertise permettra également d’établir si les conditions légales de mise en œuvre de la garantie des vices cachés sont réunies (article 1641 du Code civil) ou si, au contraire, les vices étaient apparents et donc exclus de cette garantie (article 1642 du Code civil).
Les enseignements à tirer de ces arrêts
Outre leur apport jurisprudentiel, ces décisions présentent plusieurs enseignements importants pour les acheteurs et vendeurs de biens immobiliers :
- Une vigilance accrue lors des visites : Il est essentiel d’être particulièrement vigilant lors des visites de biens immobiliers, notamment en matière de fissures. Un examen attentif pourra aider à déterminer si elles relèvent d’un vice apparent ou d’un vice caché.
- La nécessité d’une expertise : Si des fissures sont découvertes après l’achat d’un bien immobilier, il convient de faire réaliser rapidement une expertise pour déterminer leur origine et leur gravité. Cela permettra également de mettre en œuvre, si nécessaire, la garantie des vices cachés.
Ainsi, connaître les règles applicables en matière de garantie des vices cachés, ainsi que les enseignements issus de la jurisprudence récente, est crucial pour sécuriser les transactions immobilières entre particuliers. En cas de graves fissures sur un bien immobilier, la distinction entre un vice «apparent» et un vice caché peut être difficile à établir et nécessite souvent le recours à une expertise judiciaire. L’intervention d’un professionnel du droit, comme un avocat, sera alors précieuse pour aiguiller et accompagner l’acquéreur tout au long de cette procédure.